Ce MES qui fait hurler tant de gens ? Video explicative du MES

 

 

Mais c'est quoi ce MES qui fait hurler tant de gens ?

 

 

Décrié par le Front de Gauche, le Mécanisme européen de stabilité (MES), ce nouveau fonds de soutien aux pays de la zone euro en crise a été adopté mardi par l'Assemblée nationale, après un débat « fougueux », alors que les députés socialistes étaient appelés à s'abstenir. Le Sénat devrait suivre le même exemple mardi prochain. 

Le but du MES est de sauvegarder la stabilité de la zone euro de manière permanente. Le traité est maintenant en cours de ratification par les différents Etats membres et devrait entrer en vigueur en juillet 2012.

De nombreux citoyens sont très hostiles à ce nouveau mécanisme qui représente selon eux un abandon de souveraineté et un renforcement des règles « automatiques » imposant la rigueur aux peuples. Qu'en est-il ?

 
1 Comment est né le MES ?

 

Le 9 mai 2010 : la Commission confie au Conseil Ecofin une proposition de règlement permettant d'établir le Mécanisme européen de stabilisation financière (MESF).

Les 9 et 10 mai 2010, les ministres des finances des 27 états approuvent la création du MESF et du Fonds européen de stabilité financière (FESF) :

  • le premier, le MESF, est un organisme communautaire adossé au budget de l'Union européenne et n'est garanti « que » à hauteur de 60 milliards d'euros (auxquels s'ajoutent 30 milliards d'euros de garanties du FMI) ;
  • le second, le FESF, est un organisme inter-gouvernemental doté de 440 milliards d'euros de capital garanti (le FMI garantissant 220 milliards d'euros de plus, le capital garanti s'élève à 660 milliards d'euros).

Aussi, afin de « pérenniser » un mécanisme européen de stabilité, les dirigeants européens doivent modifier le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Validée par le Parlement européen, la modification de l'article 136 du TFUE est entérinée par le Conseil le 25 mars 2011. Elle devra, dans le même temps que le Traité MES, être ratifiée par les Parlements nationaux.

Le 2 février 2012, une deuxième version du traité a été signée afin d'y intégrer des nouveautés dans plusieurs domaines.

 
 
2  L'absence de transparence (et autres soupçons)

 

 

Ses grandes lignes étaient connues depuis le Conseil Européen des 24 et 25 mars 2011.

Depuis juillet 2011, date de sa signature, la suspicion règne sur le Net vis-à-vis de ce traité, alimentant la peur d'une « dictature financière ». Certains se demandent aussi si sa ratification s'est faite légalement

Pourtant très attendue, sa signature n'a pas été commentée dans les grands médias. Seuls les sites officiels ainsi que certains médias spécialisés ont rapporté l'information.

 
 
3  Structure et objectifs du futur organisme

 

Le MES sera une institution internationale composée :

  • d'un conseil d'administration présidé par un directeur général et dont le travail sera de gérer les affaires courantes et techniques ;
  • d'un conseil des gouverneurs chargé de prendre les décisions importantes.

Ce dernier, regroupant les ministres des finances des Etats membres :

  • élira son président pour un mandat de deux ans renouvelable ;
  • nommera aussi le directeur général du conseil d'administration pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois.

Le but de cet organisme sera de prendre la suite du FESF en finançant sous conditions un Etat membre si sa situation menace la stabilité de la zone euro. Ce mécanisme pourra lever des fonds via des instruments financiers (par des émissions d'obligations notamment), mais aussi via des accords de coopérations avec des états non-membres ou des institutions tiers telles que le FMI.

 
 
4  Les pommes de discorde

 

Objet du scandale n°1 : le capital

Tout comme ses prédécesseurs, le MES ne prêtera pas son propre argent aux Etats en difficulté. Il se base sur un capital garanti par les Etats membres pour pouvoir emprunter sur les marchés. Le capital s'élevant au total à 700 milliards d'euros dont 11% seulement (80 milliards d'euros) seront réellement versés durant les cinq années suivant la ratification du traité. Deux types de capital :

  • des fonds mobilisables qu'on appelle capital libéré (c'est l'argent que les Etats auront vraiment donné au MES), d'un montant initial de 80 milliards d'euros ;
  • un capital non libéré (il est sujet à appel mais n'est pas versé tant qu'on n'en a pas besoin) d'un montant initial de 620 milliards d'euros.

Ce qui pose problème à certains commentateurs, c'est le fait que le conseil des gouverneurs pourra décider de modifier ces montants. Il pourra donc, d'un commun accord (unanimité des votants, l'abstention n'étant pas comptée), augmenter le montant du capital libéré ou non libéré.

Le conseil des gouverneurs aura par ailleurs la possibilité de faire appel à du capital non libéré des Etats membres.

Dans les cas extrêmes où le MES se verrait dans l'incapacité potentielle d'honorer ses créanciers, le directeur général pourra faire appel au capital non libéré : les Etats s'engageront alors inconditionnellement et irrévocablement à procéder au paiement dans les sept jours suivant l'appel.

Enfin, le conseil d'administration pourra, à la majorité simple, faire appel au capital non libéré pour maintenir le niveau de capital libéré : si, à cause de pertes, le montant du capital libéré descend à 75 milliards, il pourra alors demander aux Etats de libérer 5 milliards d'euros pour revenir au montant prévu de 80 milliards d'euros de capital libéré.

Objet du scandale n°2 : immunité, privilèges et manque de transparence

Le MES « aura pleine personnalité juridique et aura pleine capacité juridique ». Il pourra aller en justice, acquérir et aliéner des biens immobiliers et mobiliers ou passer des contrats. Tous ses biens, fonds et avoirs jouiront de l'immunité de toute forme de procédure judiciaire et seront exempts de restrictions, réglementations, contrôles et moratoires. Sa propriété, son financement et ses actifs seront exempts de perquisition, réquisition, confiscation ou saisie, d'où qu'elles émanent.

Ses archives et documents, ainsi que ses locaux seront inviolables. Les employés seront à l'abri de toute poursuite à l'égard d'actes accomplis en leur qualité officielle, seront soumis au secret professionnel, paieront un impôt interne décidé par le conseil d'administration ​(les salaires et émoluments étant exempts de l'impôt sur le revenu national).

Notons que le conseil des gouverneurs aura le pouvoir de lever certaines immunités quand il le jugera opportun et surtout, que ce régime juridique est le régime classique pour une institution internationale.

Objet du scandale n°3 : le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance

Le traité établissant le MES fait explicitement mention du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, signé par 25 Etats de l'Union européenne le 30 janvier 2012, et qui a pour but de renforcer la discipline budgétaire des Etats signataires. En effet, une des conditions d'accès à l'assistance du MES sera d'avoir au préalable ratifié le TSCG et d'avoir créé un mécanisme de correction budgétaire (la « règle d'or »). C'est à cause de cette mention faite du TSCG que les parlementaires socialistes sont appelés à s'abstenir.

 
 
5  En résumé, un pouvoir immense

 

Le MES aura un immense pouvoir au sein de la zone euro et prendra la place du FESF en Juillet 2012 (si le processus de ratification se passe sans problème dans les 17 Etats signataires).

Le capital pourra être modifié à l'unanimité des gouverneurs, offrant donc une flexibilité potentielle tout en gardant la possibilité pour un membre d'user de son droit de véto.

La France y est engagée à hauteur de 142,7 milliards d'euros, dont 16,3 milliards d'euros de capital à libérer dans les cinq ans suivant 2013, soit environ 3,26 milliards d'euros par an.

Bien sûr, si la décision d'augmenter le capital était prise, la France et les autres membres devraient augmenter leurs transferts vers le MES.

Certains transferts de capital non libéré pourraient être exécutés par les Etats, dans les cas extrêmes, dans les sept jours suivant l'appel du directeur général.

Facteur à ne pas négliger non plus : aucun acteur de ce système n'est élu ni responsable devant les peuples européens.

 

 

 


Comprendre le MES et le FESF (Libre Journal... par LeLibreTS

 

 
Lior Chamla | Citoyen et blogueur tatillon
rue89.com

 



26/02/2012

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