DOSSIER Laplace 3: La verite aux travailleurs ! Nerfs d Acier

 

 

Voici la réponse de Nerfs d’Acier, aux personnes courageusement anonymes, qui ont voulu la faire taire : J’ai fait une synthèse « maison » du rapport Laplace, mettant en évidence tout ce qui pouvait à mon sens, servir, contribuer à sauver la sidérurgie liégeoise. À bon entendeur, je vous salue.

 

 

Rapport présenté par

Laplace Conseil

 

à la Sogepa et au Gouvernement Wallon ainsi qu’à

l’ensemble des travailleurs et des entreprises impactés

par le projet de fermeture du Chaud de Liège d’ArcelorMittal

 

 

ENTAMER UNE DISCUSSION CONSTRUCTIVE AVEC ARCELORMITTAL

La négociation qui s’est engagée entre ArcelorMittal et ses travailleurs n’a pas pour

objet la fermeture du Chaud, car celle-ci est irréversible; elle a pour objet de définir

un mode de relation meilleur pour sécuriser le Froid et pour financer les coûts

sociaux et environnementaux liés à la fermeture. Nous préconisons que cette

discussion porte sur les cinq points mentionnés ci-dessus :

 

1. Sécuriser le Froid par la création d’une filiale industrielle et commerciale

semi-autonome associant les syndicats et la Région à sa gestion et à son

Conseil d’Administration selon des modalités équilibrées.

2. Construire une aciérie électrique à Chatelet pour produire les brames à

laminer sur le train de Carlam/Carinox pour alimenter le Froid.

3. Affecter les profits de l’exploitation de la cokerie et de la vente du coke à la

réhabilitation des sites fermés.

4. Créer une société de défaisance reprenant l’ensemble des actifs du Chaud à

financer en partie par les profits de l’exploitation de la cokerie tant qu’elle sera

en vie et à capitaliser par ArcelorMittal, éventuellement avec l’aide de la

Région, pour garantir l’assainissement complet des sites à chaud en dix ans.

5. Indemniser, entièrement par ArcelorMittal, l’ensemble des travailleurs

concernés par la fermeture.

 

Nous espérons qu’un tel accord sera possible, car il nous paraît être dans l’intérêt des deux parties.

Cependant, les Liégeois doivent aussi se préparer à l’éventualité inverse. Dans ce cas, il faudra tenter de retrouver l’indépendance de Cockerill et s’inspirer à nouveau de l’exemple Sarrois qui y est parvenu à force de persévérance et grâce à la cohésion de toutes les forces vives du Land. ArcelorMittal a été contraint de céder une partie de sa participation dans Dillingen et ne détient plus qu’une position minoritaire sans possibilité de contrôle des décisions stratégiques. (p14)

 

Aujourd’hui, la jurisprudence européenne évolue rapidement pour limiter le droit des actionnaires à transférer des activités industrielles majeures d’une région àl’autre lorsque la nécessité économique n’est pas démontrée de façon indiscutable. La position actuelle d’ArcelorMittal de construire des capacités nouvelles à Dunkerque, Gand et Brême pour fermer celles de Liège et ce pour un bénéfice très discutable et spéculatif pour Liège devrait, à notre avis, s’examiner sous l’angle de l’abus de droit si ce choix n’est pas compensé de façon adéquate. Si nécessaire, il faudra demander à la Justice Européenne de se prononcer sur ce point. (p15)

 

 

CHAPITRE 1

LE PROJET DE FERMETURE

DU CHAUD DE LIEGE PAR ARCELORMITTAL

 

Le 14 octobre 2011, ArcelorMittal a annoncé son intention de fermer définitivement

l’essentiel de la phase à chaud de la sidérurgie liégeoise, déjà à l’arrêt conjoncturel, et a ouvert la procédure « Renault » pour mettre son plan en oeuvre.

Selon diverses estimations, le coût social sera au minimum de 100 à 150 M€ et le coût de remise en état sera de 300 à 600 M€ selon le nombre de sites effectivement fermés et le degré de dépollution des sols envisagé. (p16)

 

 

JUSTIFICATION DE LA FERMETURE PAR ARCELORMITTAL

Selon ArcelorMittal, son intention de fermeture définitive est justifiée par trois

facteurs « inéluctables » :

1. La baisse de la demande européenne d’aciers plats, en particulier pour la

« Business Unit Nord » dont fait partie le site de Liège.

2. L’intensification de la concurrence et l’accroissement des importations extracommunautaires,

en particulier de Chine et de Corée.

3. Le maintien d’un différentiel défavorable de coût (estimé à environ 50 €/tonne) de

la brame produite à Liège par rapport au benchmark de la Business Unit Nord,

malgré les progrès de productivité réalisés par le personnel. Ce différentiel est

présenté comme incompressible car il serait lié à la localisation et la dispersion des

outils de Liège.

 

CRITIQUE DES EXPLICATIONS FOURNIES AU COMITE D’ENTREPRISE

Les explications fournies par ArcelorMittal au Comité d’Entreprise sont partielles,

spéculatives et en partie inexactes. Elles ne permettent pas de justifier en termes

économiques la fermeture du chaud de Liège.

Or, par application de la législation issue de la controverse portant sur la fermeture

de l’usine de Vilvorde par Renault, il appartient au Groupe souhaitant fermer une

installation industrielle majeure d’apporter la démonstration crédible que cette

fermeture est inévitable et pleinement justifiée par des contraintes économiques

incontournables. Les intentions d’ArcelorMittal ne peuvent donc être mises en oeuvre. (p17)

 

 

1. RENTABILITE ECONOMIQUE POUR LE GROUPE DE LA FERMETURE DU CHAUD DE LIEGE

Dans sa communication au Comité d’Entreprise, ArcelorMittal envisage un gain de

56 €/t qui serait à porter au crédit de la fermeture du Chaud de Liège et du transfert

subséquent de la production de brames vers Dunkerque.

Ce gain serait composé selon ArcelorMittal de 4 facteurs :

(a) modification des prix de transfert des brames (27 €/t),

(b) différentiel de coûts entre Liège et Dunkerque (34 €/t),

(c) effet d’activité à Dunkerque (5 €/t),

(d) coûts supplémentaire de transport des brames de Dunkerque vers Liège (-10 €/t).

 

Cette justification est incorrecte au plan économique pour les raisons suivantes :

• La moitié des économies (27 €/t) envisagée n’a aucun effet réel sur les comptes

consolidés du Groupe puisqu’elles seraient simplement le résultat d’un

changement dans les règles comptables de calcul du prix de transfert des brames

de Dunkerque vers Chertal à savoir le remplacement des prix « spot »

actuellement pratiqués par des prix « long termes » dont le mode de calcul n’est

pas précisé (Cfr Comité d’Entreprise du 22 novembre 2011).

• Compte tenu d’une activité du chaud en 2011 de l’ordre de 2 Mt, le gain

économique consolidé pour le Groupe serait donc au mieux de 58 M€ par an (56 –

27 €/t x 2Mt/an), selon les informations qui ont été communiquées au Comité

d’Entreprise.

• Selon diverses estimations concordantes, il faudra provisionner puis financer 300

à 600 M€ pour réhabiliter les sites fermés. Il faut aussi ajouter les coûts sociaux

pour les 581 ouvriers et employés, ainsi que, probablement, pour les soustraitants

qui prestent uniquement pour cette sidérurgie à chaud, soit au

minimum 100 à 150 M€.

Le « pay-back » économique de l’opération de fermeture du Chaud de Liège et du

transfert à Dunkerque serait donc de l’ordre de 8 à 13 ans et ne peut en aucun cas être justifié sur un critère financier rationnel.  

En conclusion, l’argument économique présenté par ArcelorMittal pour justifier la fermeture est inexact. (p18)

 

 

2. BAISSE ANNONCEE DE LA DEMANDE DACIER

ArcelorMittal présente au Comité d’Entreprise une vue particulièrement pessimiste

des développements à moyen terme de la sidérurgie Européenne, exploitant de façon exagérée les incertitudes liées à la crise actuelle des dettes souveraines.

Pourtant, dans une présentation du 8 décembre 2011 à un séminaire organisé par

Eurofer sur le marché de la construction, des dirigeants d’ArcelorMittal présentaient

une perspective plus réaliste et prévoyaient une stabilisation de ce marché, le plus

important pour Liège, en 2012 et une reprise progressive en 2013.

 

En conséquence, les craintes et incertitudes sur le marché de l’acier annoncées par ArcelorMittal sont excessives et ne peuvent permettre de justifier une fermeture définitive d’un site majeur de production d’acier.

(p18)

 

  

3. INTENSIFICATION DE LA CONCURRENCE ET DES IMPORTATIONS

Parallèlement à cette baisse de la demande qui reste largement spéculative à moyen

terme, ArcelorMittal invoque un accroissement des importations, notamment de

Chine et de Corée. L’analyse des importations de produits plats démontre au contraire que depuis 2007, les importations européennes en provenance de Chine ont été réduites de moitié de 7 Mt en 2007 à moins de 3 Mt en 2010. Les importations de Corée sont négligeables à moins de 1 MT par an, celles de Russie sont stables à 2 Mt et celles du Brésil ont presque totalement disparu. (p19)

 

Il faut donc conclure de l’analyse des trois raisons présentées par ArcelorMittal que la fermeture proposée ne se justifie par des critères économiques réels sauf si ArcelorMittal n’a pas l’intention de payer l’ensemble des coûts de fermeture et des coûts sociaux induits par sa décision. (p20)

 

 

LES RAISONS DU PLAN DE FERMETURE DU CHAUD DE LIEGE

Depuis l’OPA sur Arcelor, le Groupe met en place une stratégie dans laquelle

l’avenir de la sidérurgie liégeoise (ainsi que d’autres sites) est devenu d’importance

marginale.

Cette stratégie se caractérise :

• D’une part, par une priorité croissante donnée au renforcement du Groupe dans

l’amont minier (minerai de fer et charbon) jugé plus rentable et qui reçoit

l’essentiel des investissements actuels.

• D’autre part, par des choix de consolidation de la production d’acier dans un

nombre réduit d’usines et par la limitation au strict minimum, - certains

ingénieurs affirment moins que le minimum -, des investissements de maintien, a

fortiori de développement de la sidérurgie, en particulier en Europe.  (p20)

 

La véritable raison de la fermeture du Chaud de Liège est de permettre les augmentations de capacités de production de ces trois usines (Dunkerque,

Gand et Brême) et de rentabiliser ses augmentations quelles qu’en soient les conséquences pour Liège. Ce point essentiel est examiné ci-dessous. (p22)

 

de nombreux investissements d’économies d’énergie et d’augmentation de

capacité ont été réalisés sur les trois sites, alors qu’à Liège, aucun investissement

significatif de ce type n’a été réalisé dans la phase à chaud de Liège depuis très

longtemps. C’est dans ce différentiel d’investissements de modernisation que se trouve l’origine de l’écart de coûts entre Liège et les autres sites concurrents et non dans la localisation ou la dispersion des outils ou encore une moindre productivité qui serait imputable à Liège.

 

 

LA FAUSSE JUSTIFICATION DE LA LOCALISATION « MARITIME »

Depuis le plan Apollo de 2002, les usines européennes ont été classées arbitrairement en usines « maritimes » supposées performantes ou en usines « continentales » supposées obsolètes, donc à fermer. Liège a donc accès aux plus grand port de la Région. Pour un transport de minerais depuis le Brésil (principale source pour l’Europe) l’avantage est 5 à 7 €/t. il est encore bien plus grand pour les minerais en provenance d’Australie. (p24)

 

 

Dunkerque est le moins performant et le plus coûteux des ports utilisés par la BU

Nord. En attendant l’agrandissement de son écluse de Zelzate, Gand transborde également du minerai depuis Rotterdam ou Anvers pour un coût comparable à celui de Liège. Au total, Liège est une localisation au moins aussi « maritime » que ses rivales de la BU Nord,… mais quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage. (page 24)

 

 

ECHEC DE LA STRATEGIE MONDIALE

ET PERTES DE PARTS DE MARCHE PAR ARCELORMITTAL

La réduction du nombre d’usines programmée par ArcelorMittal et dont Liège serait

la première victime est tout d’abord la conséquence d’une volonté d’agrandissement

des autres sites, en particulier Dunkerque, Gand et Brême.

Nous avons rencontré récemment les responsables des achats de plusieurs grands

clients d’ArcelorMittal. Pour la plupart, ils nous ont fait part de leurs insatisfactions

L’événement récent le plus marquant et inquiétant de l’évolution de la compétitivité du Groupe en Europe est sans doute la perte du marché des brames de Dunkerque pour alimenter le train à tôles fortes et la tuberie de Europipe (GTS) qui appartient à Dillingen et qui se situe dans l’enceinte de l’usine de Dunkerque. (25)

 

Dunkerque présente cette perte de marché, liée à un investissement de Dillingen comme une raison supplémentaire de fermeture de Liège, car elle dispose ainsi d’un surplus de disponibilité de 800 kt. (page 26)

Outre la perte du marché d’Europipe, Dunkerque a perdu le marché de Basse-Indre

(0,2 Mt) au profit de l’usine d’Aviles en Espagne et Brême a perdu son client et

partenaire historique de Marcegaglia au profit de Fos-sur-Mer (0,5 Mt).

 

 

SYNTHESE DES CAUSES DE LA FERMETURE DU CHAUD DE LIEGE

 

En synthèse, l’intention de fermeture de la phase a chaud de Liège par ArcelorMittal n’est pas le fait d’une « fatalité incontournable » telle que présentée par ArcelorMittal, mais la résultante d’une stratégie d’augmentation de capacité de production dans d’autres usines proches et de transfert de certains fonds de commerce (Marcegaglia, Basse Indre) du Nord vers le Sud Europe.

 

Si ArcelorMittal entend poursuivre cette stratégie, il lui appartient au préalable de :

Présenter de façon convaincante les justifications économiques et de démontrer qu’une stratégie de maintien d’une activité du Chaud à Liège serait impossible rationnellement

Présenter des garanties appropriées que l’entreprise honorera toutes les conséquences

économiques, notamment le dédommagement des travailleurs licenciés et la remise en état complète des sites fermés.

• Présenter un plan crédible de maintien durable et rentable de la phase à froid si elle est alimentée par Dunkerque. (page 26)

 

  

LA SITUATION DE LA COKERIE D’OUGREE

ArcelorMittal a confirmé son projet de 2009 d’alimenter le recuit continu de Kessales

en gaz de four à coke en remplacement de gaz naturel. Cet investissement a été

décidé en 2010 et mis en service en novembre 2011, après l’annonce de la fermeture. Les raisons économiques qui conduisent ArcelorMittal à conserver la cokerie en activité sont simples : le coke produit sera transféré à Gand et Dunkerque à prix coûtant selon les règles comptables internes au Groupe.

Ce transfert libèrera à la marge une quantité équivalente de production dans les

autres cokeries du Groupe, principalement la cokerie Prosper (Allemagne)

récemment acquise par ArcelorMittal. Ce coke supplémentaire sera vendu à des

concurrents à des prix de marché !

 

Tel que prévu par ArcelorMittal, les bénéfices de cette exploitation, la seule activité

restante à Ougrée et Seraing, échapperaient donc entièrement à Liège, tandis que la

pollution forte de cette unité obsolète lui resterait acquise en totalité. En outre,

aucune provision n’est à notre connaissance constituée pour financer le

démantèlement de cette cokerie en fin de vie et pour la remise en état du site.

 

Nous estimons que cet ensemble de modalités, si elles étaient confirmées, serait absolument inacceptable par les Liégeois. Si cette cokerie continue de fonctionner, il faudra s’assurer que la totalité des profits de son exploitation soit entièrement utilisés pour contribuer à financer les travaux d’assainissement des sites d’Ougrée et de Seraing ainsi que celui de Chertal et contribuer à un fonds pour le démantèlement et l’assainissement du site en fin d’exploitation. (page 27)

 

 

LES MENACES QUI PESENT SUR LE FROID DE LIEGE

Le Fer Blanc de Liège a fait récemment plusieurs efforts de Productivité. (p 28)

 

COMPETITIVITE DES APPROVISIONNEMENTS EN BRAMES DE DUNKERQUE

la qualité des relations logistiques, il est évident que le prix de transfert des

brames doit refléter un partage équitable de la marge et des risques encourus par

l’amont et l’aval. ArcelorMittal fait état pour l’avenir d’un prix de transfert basé sur une relation de« long terme » qui serait bénéfique à Liège. La formule qui serait établie, si ces intentions se confirment, devra faire l’objet d’une attention particulière, en ce

compris ses implications fiscales.

 

AFFECTATION DES COMMANDES ET RELATIONS CLIENTS

Objectivement, les usines à froid de la BU Nord sont en concurrence pour les

commandes des clients. Il est donc essentiel que l’équipe commerciale en charge des affectations soit parfaitement neutre et applique des règles claires, comprises et

partagées sur les décisions d’affectation, quotidienne, hebdomadaire, mensuelle et

annuelle.

Ceci demande a minima que des représentants de chaque usine participent au

processus, que des indicateurs synthétiques d’affectation soient communiqués et

que des voies de recours soient possibles si un site estime être défavorisé.

De même, les relations technico-commerciales avec les clients doivent être

maintenues et cette interface majeure qui est une composante importante du « fonds

de commerce » d’un site ne doit pas être centralisée, ni a fortiori monopolisée. (p29)

 

INVESTISSEMENTS DE MAINTIEN ET DEVELOPPEMENT PRODUITS

Les usines à froids de Liège doivent continuer d’investir pour maintenir leur niveau

compétitif. Ces investissements doivent accompagner les développements produits

pour lesquels il existe une réelle compétence à Liège, notamment dans le revêtement sous vide. De même, les unités de Recherches et Développement doivent faire l’objet d’une attention particulière pour le maintien à long terme de la compétitivité de Liège et le regroupement de laboratoires, ainsi que les missions qui leur sont affectées doivent respecter des règles d’équilibre et être justifiées clairement.

En synthèse, si ArcelorMittal persiste dans son intention de fermer le Chaud, ces facteurs doivent constituer l’ossature d’un accord entre ArcelorMittal et les représentants du site de Liège pour définir l’avenir du Froid. En l’absence de garanties convaincantes sur ces facteurs, il faudra en conclure que les intentions d’ArcelorMittal ne s’arrêtent pas à la fermeture du Chaud.(p30)

 

 

CHAPITRE 2.

SE DONNER LES MOYENS DE SORTIR DE LA CRISE

 

UN SURSAUT EST POSSIBLE

les Liégeois ont été à plusieurs reprises capables de sursaut et de faire des progrès rapides de performance, comme ce fut le cas autrefois avec les projets type Horizon 2000 ou Delta. Plus récemment, dans le Fer Blanc avec l’amélioration de la compétitivité de la filière via, entre autres, la rationalisation d’outils (et la réduction de capacité de 250 à 150 kt/an). Ensuite, pour réduire les coûts de transformation de la phase à chaud d’un montant de près de50 €/tonne, dont près de 40 €/tonne de réduction de frais fixes par la mise en place d’organisations « lean ».

Les Liégeois sont également capables, lorsqu’ils le veulent, de faire preuve de

pragmatisme et de démontrer leurs savoir-faire dans le métier difficile de

sidérurgiste. (p34)

 

PROPOSITION

QUATRE OBJECTIFS

Cette Commission de Réconciliation devra déboucher sur quatre résultats tangibles :

1. Faire le deuil de la perte du chaud, en accepter les causes et décider d’en changer.

2. Générer un consensus Liégeois sur une plateforme commune de cogestion de la

crise actuelle afin d’être plus efficace pour négocier avec ArcelorMittal.

3. Trouver un point de vue partagé sur les objectifs à atteindre de cette négociation :

- Evolution de la sidérurgie à froid et garanties de pérennité

- Approvisionnement en coils à chaud compétitifs en provenance de Chatelet

- Financement des coûts d’assainissement

- Remise en état de l’ensemble des sites fermés

- Compensations pour les travailleurs du chaud, directs et indirects.

4. Nommer une équipe pluridisciplinaire de négociateurs pour piloter la négociation

avec ArcelorMittal dans le cadre de la procédure Renault en cours. (p35)

 

 

CHAPITRE 3.

LES VOIES INDUSTRIELLES ET COMMERCIALES

D’UNE SORTIE DE CRISE

 

principal handicap de la sidérurgie à chaud de Liège se trouve dans la gestion de l’énergie et en particulier dans celle des gaz coproduits par les hauts fourneaux et la cokerie. Cette mauvaise valorisation a pour cause essentielle le manque d’investissements. En synthèse, le retard d’investissement est trop important aujourd’hui et, malgré les efforts récemment entrepris par le personnel pour réduire les coûts opérationnels, il est trop tard pour espérer le rattraper. (p36)

 

Il faut noter que ces retards obèrent l’avenir à moyen terme, mais ne peuvent aucunement justifier la fermeture aujourd’hui qui est exclusivement motivée par la volonté d’ArcelorMittal d’accroitre la capacité des usines de Dunkerque, Gand et Brême et de concentrer la production dans ces usines. (p37)

 

UNE AUTRE STRATEGIE EST POSSIBLE POUR LE CHAUD

L’approvisionnement en brames au départ de Dunkerque est le point faible de la

stratégie d’ArcelorMittal pour sécuriser le Froid de Liège. En effet, selon les propres

estimations du Groupe présentées au Comité d’Entreprise, le gain du transfert

d’activité est faible et pour moitié factice.

En outre, la compétitivité de Dunkerque peut être mise en doute puisqu’il vient de

perdre son plus gros client en volume, la société Europipe (GTS), filiale de Dillingen

en Sarre. (p37)

 

Il faut s’interroger pour comprendre comment une usine relativement petite,

continentale selon la définition d’ArcelorMittal, bien plus éloignée de l’Océan que

Liège puisqu’il lui faut s’approvisionner par Rotterdam via le Rhin puis la Moselle

puis la Sarre, parvient à être compétitive en renvoyant ces brames vers Dunkerque.

Dans le même temps, Dunkerque estime rentable d’envoyer des brames vers

Florange située à 70 km seulement de Dillingen !

Compte tenu de ces incertitudes, si le Chaud de Liège devait être fermé, nous préconisons d’examiner avec attention un approvisionnement alternatif du Froid de Liège par des coils à chaud produit sur le train à bande de Chatelet (Carlam) et qui serait alimenté en brames par un four électrique à construire dans l’aciérie actuelle, dite de Carinox. (p38)

 

UNE PROPOSITION « GAGNANT-GAGNANT »

Notre proposition peut être mise en oeuvre pour renforcer la compétitivité et la

sécurité du froid de Liège, celle de l’inoxydable d’Aperam, celle de la BU Nord, ce

qui renforcera d’autant celle de la Wallonie. Elle demandera une forte coopération

entre Liège et Charleroi pour la faire émerger.

1. Sécuriser l’approvisionnement du froid de Liège :

Malheureusement, cette option entraînerait la fermeture du TLB (Chertal) et des pertes d’emplois directs à Liège qu’il faudra compenser. L’augmentation des emplois à Charleroi ouvrira des postes qui devront être réservés en priorités aux

travailleurs de Liège, mais on sait que la mobilité est généralement faible. (p40)

 

3. Réduire les coûts d’investissements et les surcapacités d’ArcelorMittal. La

solution proposée, construire un four électrique à Carinox, est moins coûteuse en

investissements que d’accroître la capacité sur les trois sites de Dunkerque, Gand

et Brême. Cette solution permet également de fermer le train à bande de Liège. (p41)

 

 

PRESERVER LE FONDS DE COMMERCE DU FROID A LIEGE

 

DISPOSER DOUTILS ET DINFRASTRUCTURES COMPETITIVES

Les outils de la sidérurgie à Froid de Liège sont globalement compétitifs et plusieurs

figurent parmi les meilleurs du Groupe. Les lignes de revêtement métallique et/ou organique sont de classe mondiale. (p 42)

 

ETRE AU SERVICE DES CLIENTS

Aujourd’hui, les représentants liégeois sont quasiment exclus du département

commercial de la Business Unit Nord qui affecte les commandes entre les cinq sites.

Il importe donc qu’au sein de cette unité, une meilleure égalité des chances soit

respectée et que la concurrence interne entre sites soit maîtrisée par les instances

centrales.

Pour permettre le retour à ces conditions indispensables à l’avenir de cette activité majeure pour l’économie wallonne, nous préconisons qu’ArcelorMittal filialise le Froid de Liège et dote cette entité des moyens, notamment commerciaux et de développement produits, d’assurer au site une autonomie relative, en coopération étroite avec les autres unités à froid du Groupe, en particulier dans l’automobile. Tout en gardant la majorité de contrôle, ArcelorMittal inviterait au conseil d’administration de cette filiale des représentants syndicaux liégeois et des représentants de la Région qui seraient associés aux décisions stratégiques qui affectent l’avenir de cette entité. (p43)

 

 

CHAPITRE 4

ENTAMER UNE DISCUSSION CONSTRUCTIVE

AVEC ARCELORMITTAL

 

La mise en oeuvre d’un plan d’avenir doit comprendre quatre volets :

(a) un avenir stable pour le Froid,

(b) une aciérie électrique à Charleroi,

(c) une réhabilitation complète des sites fermés,

(d) un dédommagement approprié des travailleurs qui perdent leur emploi

Liège peut avoir un meilleur avenir au sein d’ArcelorMittal si un nouvel équilibre plus juste s’établit au sein de la Business Unit Nord et plus généralement au sein de la division Flat Carbone Europe.

 

Il faut donc trouver des moyens plus efficaces pour s’opposer au plan actuel

d’ArcelorMittal qui est inacceptable, tant dans sa présentation actuelle que dans ses modalités d’applications et surtout pour le manque de perspectives pour le Froid. Les arguments présentés à ce jour au Comité d’Entreprise sont erronés et doivent donc être rejetés. Les intentions de fermetures ne peuvent donc être mise en œuvre.  (p44)

 

 

Dans le cadre de la procédure Renault, il faudra donc inciter ArcelorMittal à négocier

avec une équipe soudée, pluridisciplinaire, calme et décidée, et si nécessaire, il

faudra recourir aux voies légales et juridiques prévues par la procédure.

Les Liégeois doivent aussi se préparer à l’éventualité inverse (Mittal ne veut pas négocier). Dans ce cas, il faudra tenter de retrouver l’indépendance de Cockerill et s’inspirer de l’exemple Sarrois qui y est parvenu à force de persévérance et grâce à la cohésion de toutes les forces vives du Land. ArcelorMittal a été contraint de céder une partie de sa participation dans Dillingen et ne détient plus qu’une position minoritaire sans possibilité de contrôle des décisions stratégiques.

Aujourd’hui, la jurisprudence européenne évolue rapidement pour limiter le droit

des actionnaires à transférer des activités industrielles majeures d’une région à l’autre lorsque la nécessité économique n’est pas démontrée de façon indiscutable. La stratégie actuelle d’ArcelorMittal de construire des capacités nouvelles à Dunkerque, Gand et Brême pour fermer celles de Liège pour un bénéfice très discutable et spéculatif pour Liège devrait, à notre avis, s’examiner sous l’angle de l’abus de droit. Si nécessaire, il faudra demander à la Justice de se prononcer sur ce point. (p45)

 

ANNEXE 1

 

Le critère principal mis en avant pour trier les usines a été celui de la localisation : Les « bonnes » usines étaient« maritimes » et les « mauvaises » étaient «continentales ». La raison en était les coûts d’approche des matières premières.

Cette causalité simpliste est à l’évidence fausse. Plusieurs usines « maritimes » sont

« bonnes » car elles ont été construites récemment en site vierge avec des outils

modernes de grande capacité et un flux logistique efficace. Plusieurs usines

« continentales » sont « mauvaises », car elles ont été construites et reconstruites

plusieurs fois avec un flux logistique et énergétique pénalisant et des outils

généralement plus anciens et de plus petite taille. La localisation n’y est pour rien.

-Cependant, en utilisant un critère incontournable – il est impossible de changer sa

localisation – Arcelor induisait une notion de fatalité particulièrement pernicieuse.

Les usines « maritimes » se sont senties sécurisées et ont réduit leurs efforts de

progrès, comme ce fut le cas à Fos. Et les usines « continentales » ont baissé les bras. Ainsi, au moment de l’annonce du plan Apollo en 2002, Cockerill finalisait un plan volontariste d’économie, le plan Delta lancé

Les investissements n’ont pas été accordés, en particulier dans le chaud, et les

économies ne sont pas venues non plus. Seuls les gains de productivité ont été

réalisés par le personnel de Liège dans un espoir non récompensé d’infléchir la

décision des dirigeants. Il faut insister sur le caractère particulièrement désastreux de cet épisode Apollo (53)

 

 

LA PERIODE ARCELORMITTAL

 

constatation que l’on est passé d’un mode de gestion à court terme fondé sur la

préservation des emplois à un autre mode de gestion à court terme fondé sur la préservation des profits. C’est toujours une perspective à court terme alors que l’acier exige des décisions équilibrées sur des critères de long terme.

Progressivement, le fonctionnement d’ArcelorMittal s’est fait plus autoritaire, plus concentré, plus secret et plus bureaucratique. Il en résulte un mécontentement grandissant, une hémorragie de talents et une apathie croissante qui est une cause importante des difficultés du Groupe.

Enfin, le basculement récent de l’axe de croissance du Groupe pour donner la priorité aux développements miniers est le signe qu’ArcelorMittal a changé profondément et pas dans l’intérêt des sidérurgistes, qu’ils soient continentaux ou maritimes. (55)

 

 

ANNEXE 3

LES AUTEURS DE CE RAPPORT

 

MARCEL GENET :

 

En 2002, il a piloté le projet Delta pour l’ensemble des usines à Chaud et à Froid

de Liège qui étaient dirigées par Bernard Serin. Le projet (qui amplifiait

l’opération Horizon 2000 entamée avant la fusion avec Usinor)

En 2006, il a conseillé la Sogepa pour mieux comprendre les enjeux de l’OPA de

Mittal.

En 2009, il a réalisé un audit de la sidérurgie wallonne, alors en pleine crise

comme toute la sidérurgie mondiale, et a mis en évidence le retard

d’investissement dans le secteur de l’énergie, en particulier à Liège.

 

 

CEDRIC ORBAN :

 

En 1996:  l’élaboration du plan Horizon 2000 et ensuite la participation à toutes les discussions avec les partenaires potentiels en vue de la création d’un partenariat stratégique pour Cockerill Sambre. Ensuite devient Directeur de la Stratégie du Groupe Usinor rapportant au CEO.

Début 2002 : il élabore le plan de restructuration des aciéries d’Europe qui conduit à la construction de Carinox.

En 2006 : il prend des fonctions opérationnelles chez Ugine ALZ (qui deviendra

Aperam Europe).

 

En 2009 : il quitte le groupe ArcelorMittal pour fonder son cabinet de conseil en

management et organisation, spécialisé dans l’acier (« COMC »).

En 2011 : projets d’organisation et de développement, en particulier dans la sidérurgie, dont deux projets pour ArcelorMittal et deux projets

pour Aperam. (62)

 

 

Votre camarade de lutte

Nerfs d'Acier

 



26/01/2012

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