L Espagne en greve generale replonge dans l austerite
L'Espagne en grève générale replonge dans l'austérité
30/03/2012
Des milliers de manifestants ont défilé dans toute l'Espagne contre les mesures d'austérité du gouvernement de Mariano Rajoy. De violents incidents ont éclaté à Barcelone.
La grève générale est le premier avertissement lancé au gouvernement de Mariano Rajoy. Trois mois après l'arrivée au pouvoir des conservateurs en Espagne, les syndicats ont mobilisé, ce jeudi, une partie de la société espagnole contre la politique d'austérité menée par l'exécutif. Dans les rues des grandes villes, les travailleurs encouragés par les principales centrales, Comisiones Obreras (CCOO) et Unión General de Trabajadores (UGT), manifestaient leur désarroi.
Le défilé a dégénéré à Barcelone, où des jeunes et les forces de l'ordre se sont affrontés et du mobilier urbain a été dégradé. «La police a dû intervenir et a utilisé des balles en caoutchouc» face à un «groupe assez important» qui a provoqué «des incidents violents», a déclaré un porte-parole du ministère régional de l'Intérieur.
Le groupe a «brûlé de nombreux conteneurs et brisé la vitrine d'un magasin». Un café Starbucks a également été incendié, ainsi que des sacs poubelles devant la Bourse de Barcelone. Des heurts ont également éclaté tout au long de la journée dans d'autres villes espagnoles, comme Madrid. Au total, 176 personnes ont été interpellées, 58 policiers blessés, ainsi que 46 manifestants.
Bataille de chiffres
Plus tôt dans la journée, Susana, une serveuse de 48 ans, déambulait entre les piquets de grève du centre-ville de Madrid. «Ce n'est pas à nous, les travailleurs, de payer une crise provoquée par le secteur financier», plaide-t-elle.
Susana pointe aussi la difficulté de faire grève dans un pays touché par un chômage de 22,85 %. «Les gens ont peur de se faire licencier. Et puis, beaucoup ne peuvent pas se permettre de perdre une journée de salaire. Moi, je vais perdre 40 euros. Ils ne peuvent pas m'enlever davantage, je ne gagne même pas 1000 euros par mois!»
Une façon de relativiser la bataille des chiffres entre le gouvernement et les syndicats. «77% de suivi», avancent les centrales; «Une journée normale», rétorque l'exécutif, qui met en avant le service minimum. Dans les rues, le climat rappelle celui de 2010, lorsque le gouvernement socialiste de José Luis Rodríguez Zapatero affrontait, lui aussi, une grève générale.
L'équipe de Rajoy entend afficher sa fermeté sur la réforme du droit du travail. «Les éléments principaux de la réforme ne seront pas modifiés, a réaffirmé jeudi la ministre de l'Emploi, Fátima Báñez. Mais le texte est ouvert aux apports et aux améliorations de toutes les forces parlementaires», a-t-elle nuancé.
La réforme, adoptée par décret le 9 février dernier, peut encore être amendée par le Parlement. Reste à savoir si les «améliorations» proposées suffiront à convaincre les syndicats. Pour le dirigeant des CCOO, Ignacio Fernández Toxo, faute de dialogue, «le conflit social s'amplifiera».
De quoi inquiéter les marchés et les responsables de la zone euro, qui espéraient être sortis de la crise. Dans ce contexte d'agitation sociale, la capacité de l'Espagne à respecter ses objectifs de déficit (5,3% du PIB en 2012, puis 3% en 2013) semble difficile à atteindre.
Le gouvernement doit présenter son budget ce vendredi en Conseil des ministres. Pour parvenir à ses fins, Madrid devra baisser les dépenses, notamment des investissements publics. Les salaires des fonctionnaires pourraient également être gelés, quitte à revenir, une fois encore, sur une promesse électorale. Du côté des recettes, Rajoy refuse de toucher à la TVA, et l'impôt sur le revenu a déjà été augmenté. Restent l'impôt sur les sociétés… et la créativité fiscale.
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