Les Dix-sept marques a la culotte: droit de regard sur les budgets nationaux 24 nov 2011

 

 

Les Dix-sept marqués à la culotte

 

L’exécutif européen veut étendre son droit de regard sur les budgets nationaux. Son Livre vert sur les euro-obligations reçoit un accueil mitigé.

 

European Commission is watching you. Alors que le paquet législatif (dit "six pack") sur la gouvernance économique n’est pas encore entré en vigueur, l’exécutif européen a présenté mercredi deux propositions pour encore renforcer la surveillance des politiques budgétaires des dix-sept Etats membres de la zone euro - dont la crise de la dette souveraine a mis en lumière l’interdépendance.

 

La Commission propose que soit étendu son droit de regard, mais aussi d’approbation des budgets nationaux. Les gouvernements des Dix-sept seraient ainsi priés de soumettre chaque année leur projet de budget à la mi-octobre. Le nouveau règlement, s’il devait être adopté par le Conseil et le Parlement européen, conférerait à la Commission le droit d’analyser ces projets et d’éventuellement émettre un avis. Les gouvernements pourraient même être invités à revoir leur copie, au cas où la Commission jugerait que ces projets de budgets s’écartent du cadre du Pacte de stabilité et de croissance - qui, pour rappel, fixe un seuil maximum de déficit public équivalent à 3 % du Produit intérieur brut et prescrit de réduite la dette publique à 60 % du PIB.

 

La Commission souhaite également "marquer à la culotte" les mauvais élèves de la zone euro. Les politiques économiques et budgétaires de ceux qui sont "confrontés à une instabilité financière grave" (la Grèce, l’Irlande, le Portugal) seraient très étroitement surveillées et leurs effets contrôlés à intervalles réguliers. Ceux qui sont "menacés d’être confrontés à une instabilité financière" sont également dans le collimateur de l’exécutif européen. La Belgique pourrait être du nombre. Elle a une nouvelle fois été menacée de sanctions financières par le commissaire aux Affaires économiques et financières et à l’euro, Olli Rehn, si le budget tant attendu ne corrige pas le déficit excessif.

 

Par ailleurs, pour ne plus revivre le scénario selon lequel un pays attendait qu’il soit trop tard avant d’admettre qu’il était face à des difficultés insurmontables, la Commission voudrait pouvoir soumettre au Conseil une recommandation invitant l’Etat en difficulté à solliciter une aide financière.

 

Sans surprise, ces propositions ulcèrent les souverainistes. "L’Union européenne fait ce qu’elle fait le mieux : créer de nouvelles règles et des couches de gouvernance pour saper la souveraineté nationale", a dénoncé l’eurodéputé tchèque Jan Zahradil (Groupe des conservateurs et réformistes). Mais même du côté des Verts européens, résolument fédéralistes, on fait la grimace et on estime que dDonner "un grand pouvoir de surveillance budgétaire à des technocrates européens [ ] constituerait une atteinte au processus démocratique".

 

"Les parlements nationaux auraient toujours le dernier mot", assure le président de la Commission, José Manuel Barroso. Néanmoins, complète le Portugais, "nous devons compléter la démocratie nationale par une démocratie européenne, sinon nous abandonnerons notre souveraineté aux marchés".

 

Si, dans une main, la Commission tient fermement le bâton de la discipline budgétaire, elle a agité, de l’autre, la carotte d’une plus grande solidarité en présentant son Livre vert sur les "obligations de stabilité". Le document ouvre trois pistes (LLB du 23/11) pour une mutualisation des dettes publiques via une substitution, totale ou partielle, des obligations nationales par des titres européens, bénéficiant de garanties communes ou séparées, selon les options.

 

Si ce Livre vert était très attendu par une majorité des groupes du Parlement européen, les Etats membres sont plus mitigés. Le Luxembourg et la Belgique ont dit, en leur temps, qu’ils étaient favorables au principe. Ce n’est "pas une solution magique", juge le grand argentier néerlandais Jan Kees de Jaeger, qui redoute un effet pervers. Le Premier ministre portugais Pedro Passos Coelho "n’est pas contre", mais ne voit pas le projet atterrir à court ou moyen terme. Quant à la chancelière allemande Merkel, elle a répété qu’étudier ce dossier avant d’avoir achevé le chantier de l’intégration économique de la zone euro revenait "à atteler la charrue avant les bœufs".

 

Plutôt qu’une fin de non-recevoir, M. Barroso perçoit dans cette attitude un signe d’ouverture. "Pour l’Allemagne, il s’agit plus d’une question de timing que sur l’option proprement dite", avance le Portugais. Le sommet européen des 8 et 9 décembre dira si son (relatif) optimisme est partagé par les chefs d’Etat et de gouvernement.

 

Olivier le Bussy

Mis en ligne le 24/11/2011 Lalibre.be



25/11/2011

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