Meister: le patron allemand s explique
Milice privée chez Meister: le patron allemand s'explique
Marcel Linden, Correspondant en Allemagne
Mis en ligne le 02/03/2012
Rüdiger Faustmann, gérant de Poppe + Potthoff, la société-mère allemande de Meister Benelux, souhaite qu’"un climat de confiance s’installe de nouveau à Sprimont", après les événements récents. Mais sur le fond, il défend la manière forte utilisée par le groupe. Selon lui, le comportement des ouvriers l’a obligé à faire appel à des gardiens de sécurité. L’entreprise a de toute évidence subi une perte de prestige en Belgique, mais en Allemagne l’affaire est passée inaperçue. Le grand syndicat IG Metall n’a pas réussi à sensibiliser l’opinion. De toute façon, les centrales ouvrières allemandes désapprouvent les occupations d’usines et les séquestrations de managers. Et P + P est une entreprise moyenne générant un chiffre d’affaires modeste de 120 millions d’euros en 2010.
Pourquoi Poppe + Potthoff a-t-il jugé nécessaire d’envoyer deux sociétés de sécurité allemandes à Sprimont ?
Après plusieurs journées de grève, nous étions simplement obligés de maintenir les fournitures pour nos clients. Quand un sous-traitant comme P + P est incapable de livrer, cela n’est pas du tout accepté par l’industrie automobile, la production automobile risquant d’être interrompue. L’atmosphère avait été très agressive au cours des jours précédents : des ouvriers avaient même séquestré deux managers pendant quelques heures. Pour cette raison, nous n’avions pas d’autre choix que de faire accompagner notre équipe par des gardes de sécurité.
Pourquoi n’a-t-on pas respecté la voie légale ? Vous auriez pu obtenir une ordonnance de référé d’un tribunal belge et un huissier aurait pu évacuer des composants de l’usine avec l’aide de la police belge.
De toute évidence, nous avons pris cette décision après une consultation juridique approfondie. Comme je l’ai dit, des arrêts de production ne sont pas du tout acceptés dans l’industrie automobile. La demande d’une ordonnance de référé aurait simplement pris trop de temps et il fallait une solution à court terme.
L’occupation d’une usine par le personnel et la séquestration de managers sont aussi interdites en Belgique. Mais cela justifie-t-il une réaction vigoureuse, qui endommage sérieusement l’image de votre entreprise ? Comment voyez-vous les relations entre les chefs d’entreprise et le personnel dans une comparaison germano-belge ?
Notre petite équipe, qui était là pour enlever les composants, était confrontée à
une centaine d’ouvriers, qui ont par exemple mis le feu à des palettes et jeté des pavés. Pour cela, il était absolument justifié de faire appel à des gardes de sécurité pour des raisons de sûreté. Dans un court laps de temps, nous avons dû choisir un service de sécurité disponible. Mais nous n’avons aucunement voulu une confrontation. Ce qui compte, maintenant, ce ne sont pas des comparaisons. Ce qui compte, c’est de rétablir une confiance mutuelle, ici, en Belgique. La production a repris et le manager assurant l’intérim est accepté des deux côtés : cela n’est certainement pas la pire condition préalable.
Savoir Plus
Le ministère des affaires étrangères de Berlin, qui a été mis au courant des incidents de Sprimont par l’ambassade de Bruxelles, « désapprouve tout acte de violence », nous a déclaré un porte-parole. Il a fait allusion tant à l’intervention des services de sécurité qu’à la séquestration de managers. Ceci dit, le ministère ne commente pas officiellement les événements. Finalement, l’Etat allemand n’est pas impliqué. L’affaire est privée : une société privée a envoyé un service privé de sécurité dans une usine.
Lalibre.be